Revue Rose-Croix – Automne 2022
 Sommaire

  • Johannes Kepler, le « Prince » des astrosophes, par A. Marbeuf
  • Caïphe contre Jésus de Nazareth : un procès hors-normes, 1re partie, par T. Guinot
  • Les mains du miracle, par I. Secousse
  • Les biais cognitifs, par C. Meignin
  • Des vérités à la Vérité, par A. Nouvel
  • Documents d’Archives de l’A.M.O.R.C. : Édition latine rarissime de la Confessio Fraternitatis précédée de Secretioris Philosophiae Consideratio Brevis

Article sélectionné dans ce numéro : N° 283 : Automne 2022

Les mains du miracle

par Isabelle Secousse 

Cet article souhaite tout d’abord rendre hommage à ceux qui en ont dicté le titre, Félix Kirsten et son biographe, Joseph Kessel. Félix Kirsten, médecin-masseur finlandais formé à la médecine tibétaine et chinoise, a soigné les grands de ce monde avant la IIe guerre mondiale. Puis, entre 1939 et 1945 il a été à son corps défendant, le thérapeute du chef nazi Heinrich Himmler. En utilisant progressivement son influence thérapeutique et son ascendant psychologique sur lui, Félix Kirsten a obtenu, en contrepartie de ses soins, la libération progressive de milliers de prisonniers détenus dans des camps au péril de sa propre sécurité. Il aurait ainsi sauvé 100 000 personnes dont 60 000 juifs… grâce à ses mains.

Ce moment de lecture vous propose de prendre le temps d’un regard émerveillé et respectueux sur nos mains qui agissent en silence dans nos vies et contribuent depuis l’aube des temps à l’évolution de l’homme. Alors dans une grande attention, entrons en contact avec elles. Et d’ailleurs, que font vos mains en ce moment ? Comment votre identité s’y reflète selon vous ? De quelles histoires sont-elles les témoins, les héritières ? Vos mains sont uniques, il n’y en a pas d’autres dans l’univers, ne serait-ce que par vos empreintes digitales. Prenez un moment pour les regarder, les considérer, les remercier…

C’est une évidence de dire que nos mains sont des instruments précieux dans notre vie physique. Cette fameuse opposition entre le pouce et les autres doigts – propre à l’homme – a permis cette préhension si fine des objets et a été une des clefs de la destinée humaine. Rien ne se concrétise dans la matérialité sans l’apport des mains. De la fabrication des outils en passant par l’activation du feu, l’élevage, l’agriculture, l’artisanat, les constructions, les transports… mais aussi plus tard dans l’industrie et aujourd’hui même au cœur de nos claviers informa- tiques, les mains sont au centre de notre intelligence en action.

Elles sont aussi au cœur de notre vie culturelle et sociale. Quelle vie aurions-nous sans leurs prouesses dans le domaine des arts, que ce soit la peinture, la sculpture, la musique, la danse, l’architecture, toutes les écritures, la littérature et tant d’autres domaines ? Les hommes préhistoriques l’avaient bien perçu lorsqu’ils les ont peintes dans de nombreuses grottes du monde comme l’expression de leur identité et de leur présence fugace dans le monde. De même, dans le domaine de la santé déjà évoqué avec l’exemple magnifique de Félix Kirsten, les mains diagnostiquent, soignent, magnétisent avec une finesse d’approche remarquable. Évoquons aussi par exemple les mûdras, le « yoga des doigts » où chacun a une correspondance anatomique et cosmique pour canaliser les énergies, apporter vitalité, soin à l’âme et au corps.

Et que dire de tous leurs talents pour aimer, cajoler, réconforter, accompagner, prendre soin, caresser ? Comment passer à côté des bienfaits d’une poignée de mains sincère scellant une rencontre, un accord, une amitié, une reconnaissance ? Ponts entre notre esprit et la matière, elles sont les instruments de notre volonté, de nos désirs, de nos états d’être, de nos capacités…

Dans leur symbolique enfin et surtout pour les Rosicruciens, elles expriment la sublime quintessence à travers les cinq doigts représentant eux-mêmes les quatre éléments plus le souffle vital. Les mains sont liées à la Connaissance, concrète, expérimentée, libérée. Ponce Pilate qui s’en lave les mains, ne veut pas connaître, ne veut pas se mêler. Et MA, sa racine signifie la Manifestation originelle de toutes choses (matière, maternel, matrice…). Quels puissants messages…

D’ailleurs, il suffit de regarder l’iconographie religieuse ou mystique du passé pour comprendre que les mains des grands initiés, parfois volontaire- ment très allongées, bénissent, donnent et reçoivent, structurent et vivifient, distillent la connaissance, la paix, la puissance aussi. Les rituels les associent toujours avec les prières, les salutations, les liens au cœur, les signes de reconnaissance… Elles ont imprimé leur marque discrète mais incontournable dans tous les aspects physiques et spirituels de nos destinées collectives et individuelles. Elles ont même leur langage propre et intime qu’on appelle le langage non-verbal qui exprime nos vraies pensées, émotions et intentions.

Alors oui, nous avons « de l’or dans nos mains » et beaucoup de nos expressions évoquent leur pouvoir (demander la main, prendre la main, avoir la mainmise…). Bien sûr, nous savons bien que si elles sont vectrices de tout ce bonheur, elles peuvent aussi porter la violence et la destruction. La dualité là aussi s’exprime mais retenons avant tout qu’un monde sans nos mains serait un monde non humain, non civilisé, non évolué. Inspirons-nous de ce qu’elles peuvent faire et véhiculer de merveilleux dans nos journées et mettons-les en conscience au service du beau, du bon et de l’utile.

Bibliographie :

KESSEL, Joseph, Les mains du miracle.
DE SOUZENELLE, Annick, Le symbo- lisme du corps humain.